Avez-vous déjà entendu parler de «polypharmacie», «usage approprié de médicaments», «déprescription»?

Il arrive, en avançant en âge, que les problèmes de santé s’additionnent et que cela requiert la prise de plusieurs médicaments par jour. Au Canada¹, on estime que 3 aînés sur 5 (62 %) ont des ordonnances pour 5 médicaments ou plus. Et la proportion est de 1 sur 4 (24 % des aînés) pour des ordonnances de 10 médicaments ou plus. On parle de polypharmacie lorsque cinq (5) médicaments et plus sont prescrits.

Pourquoi parle-t-on d’usage approprié de médicaments?

Notre corps change avec l’âge, notamment la façon dont il traite les médicaments. Les changements physiologiques qui surviennent alors, notamment au niveau du foie et des reins, peuvent avoir un effet sur l’absorption, la distribution, le métabolisme et l’élimination des médicaments. On devient ainsi plus sensible aux effets des médicaments et plus susceptibles d’avoir des effets indésirables, des interactions entre médicaments ou d’autres effets néfastes. L’élimination des médicaments devient moins efficace parce que² :

• Le cerveau devient plus sensible aux effets des médicaments; les effets peuvent durer plus longtemps;
• Puisque nous avons plus de gras corporel et moins de muscles, certains médicaments peuvent rester plus longtemps dans notre corps;
• Le foie élimine moins bien certains médicaments;
• Les reins aussi éliminent moins bien les médicaments du corps dans l’urine, ce qui peut provoquer leur accumulation;
• Notre corps contenant moins d’eau, certains médicaments peuvent devenir plus concentrés, ce qui augmente leurs effets.

Les maladies qu’on a eues auparavant et les maladies chroniques peuvent aussi provoquer des changements dans notre corps³. C’est pourquoi un médicament consommé depuis plusieurs années peut éventuellement devenir moins efficace ou créer des effets indésirables ou même néfastes. Il arrive même que l’ajout d’un médicament pour contrer un nouveau symptôme puisse créer une interaction non désirée avec un autre médicament.

Selon des données canadiennes, 2 aînés sur 5 (44 %) ont au moins une ordonnance pour un médicament potentiellement inapproprié⁴. C’est-à-dire que l’un des médicaments pris ne rend plus service efficacement à notre condition ou compromet notre confort. Dans certains cas, on parle même de médicaments « à risque » qui peuvent causer des effets néfastes : chutes et fractures, hospitalisations, problèmes de mémoire et perte d’autonomie⁵.

Comment peut-on savoir si notre médication est toujours appropriée?

Les médicaments sont très utiles pour notre santé et ont grandement amélioré la qualité de vie de bien des gens depuis leur apparition. Il n’est donc pas question ici de faire table rase, mais plutôt de s’informer et de poser des questions quant à ce qui nous est prescrit. Attention surtout de ne pas se suppléer au médecin en décidant de cesser ou de modifier soi-même la posologie des médicaments que l’on prend. N’oublions pas qu’ils ont été prescrits au départ avec une intention thérapeutique.

Toutefois, si on a le sentiment que nos médicaments nous causent des effets indésirables, qu’on en prend trop, que certains ne sont plus nécessaires ou qu’on ne sait plus pourquoi on prend un ou des médicaments, il peut être sage de demander une révision de nos médicaments auprès de notre professionnel de la santé.

Le Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription⁶ recommande également de faire réviser régulièrement notre liste de médicaments par notre médecin, notre pharmacien ou notre infirmière. Vous pourriez décider, ensemble, de faire une démarche pour modifier votre ordonnance s’il s’avère qu’un médicament ne rend plus l’effet désiré ou qu’il risque de nuire à votre santé ou à votre confort. Pensez à ajouter, dans l’équation, les produits naturels que vous consommez. Il pourrait aussi y avoir des interactions non désirables entre ces produits et les médicaments qui vous ont été prescrits. Votre pharmacien pourra vous renseigner à ce sujet.

Ce qu’on doit retenir, c’est qu’il est important d’être partie prenante dans les décisions qui concernent notre santé. Notre corps change avec l’âge, ce qui peut entraîner une modification de l’absorption de certains médicaments. Ce qui était bon pour soi auparavant ne l’est peut-être plus maintenant. La révision régulière de votre liste de médicaments par votre médecin ou votre pharmacien peut contribuer à un usage approprié de vos médicaments et ainsi, vous éviter des risques d’effets néfastes. Soyez vigilants!

Questions à poser à votre professionnel de la santé proposées par le Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription :

1. Pourquoi je prends ce médicament?
2. Quels sont les bénéfices et les risques potentiels de ce médicament?
3. Est-ce que ce médicament peut affecter ma mémoire ou causer des chutes?
4. Est-ce que je peux arrêter ce médicament ou en réduire la dose (déprescription)?
5. Avec qui dois-je faire un suivi et quand?

Ressource :

• Le Réseau canadien pour un usage approprié des médicaments et la déprescription regorge d’informations utiles et de pamphlets pour vous documenter et vous outiller. Visitez la section Public pour en prendre connaissance.

Sources :

1. Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription. Des politiques d’usage approprié des médicaments fondées sur la science. Rapport annuel 2022. [En ligne]  (Consulté le 30 mars 2023)
2. Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription. En vieillissant, soyons prudents avec nos médicaments. Pamphlet sur l’effet des médicaments en vieillissant. [En ligne] (Consulté le 30 mars 2023)
3. Tannenbaum, C. et Institut universitaire de gériatrie de Montréal (2014). Sédatifs-hypnotiques – Vous êtes à risque – Vous prenez un sédatif-hypnotique. Pamphlet révisé le 15 juillet 2019. Les somnifères et médicaments contre l’anxiété. [En ligne]
4. Op.cit. Des politiques d’usage approprié des médicaments fondées sur la science.
5. Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription. Faisons de la sécurité du médicament une priorité au Canada. Pamphlet. [En ligne] (Consulté le 30 mars 2023)
6. Op.cit. En vieillissant, soyons prudents avec nos médicaments.